Mesurer la létalité d’une munition de chasse

La létalité d’une munition de chasse est un élément très complexe à caractériser sur le terrain, un nombre important de variables rend difficile l’évaluation des performances d’un projectile. (Angle de tir, zone touchée, distance du tir …) rendant les résultats non répétables et difficilement quantifiables. Heureusement les industriels ont réussi à trouver des protocoles permettant de caractériser de manière répétable l'efficacité d’un projectile, afin d’améliorer continuellement leurs gammes. Nous allons vous expliquer la méthodologie utilisée par ces derniers.

 

Partie 1 : Un peu de physique 

 

« Rien ne se perd, rien ne se crée, tout se transforme». Pour Lavoisier, cette loi de conservation de la matière est applicable à toutes les sciences, et, bien entendu, à la balistique.

 

Ainsi nous allons appliquer cette notion dans le cadre de la “vie” d’une munition de la balistique intérieure jusqu’à la balistique terminale.

 

1.1) La balistique intérieure

La balistique intérieure concerne toute la physique appliquée au projectile tant que ce dernier est toujours dans le canon.

Cette science est particulièrement bien traitée par le logiciel Quickload (formations ici : https://bulletaddict.com/products/formation-quickload)

 

Une munition n’est plus ni moins qu’un réservoir d’énergie potentielle chimique qui n'attend qu’une chose pour s’exprimer : l’étincelle créée par l’amorce. 

 

Cette énergie potentielle stockée dans la poudre va lors du tir se convertir en 2 types d’énergies : 

 

  • L’énergie calorifique (la chaleur dégagée par la combustion)

 

  • L’énergie cinétique (la vitesse apportée au projectile, c’est bien cette dernière qui nous intéresse)

 

Énergie chimique poudre => Énergie calorifique + Énergie cinétique à la bouche 

 

À savoir que le rendement de cette combustion est assez faible (de l’ordre de 25 à 35%) et dépend de nombreux facteurs (poudre utilisée, pression de la munition, longueur du canon …) Lors de la combustion de la poudre, vous allez donc transformer entre 25 et 35% de l’énergie chimique en énergie cinétique et donc en gaspiller l’autre partie.

 

Une analogie au monde de l’automobile est possible, un moteur essence possède un rendement optimal de l’ordre de 36% quand un moteur diesel possède des rendements de l’ordre de 42% (c’est l’une des raisons pour laquelle un moteur diesel consomme moins qu’un essence) donc respectivement 36 et 42% de l’énergie du carburant vous sert à avancer, le reste est de la chaleur qu’il faut dissiper pour éviter la surchauffe.

 

Maintenant que le projectile a quitté le canon, nous rentrons dans le domaine de la balistique “extérieure”.

  1.2) La balistique extérieure

Le projectile venant de quitter le canon, sa vitesse ne va faire que décroitre, en effet les frottements de l’air sur le projectile vont entraîner la chauffe du projectile et de l’air ambiant, et ainsi dissiper de l’énergie cinétique en énergie calorifique.

 

La vitesse à laquelle cette énergie cinétique va être perdue dépend de la forme du projectile et de ses capacités à fendre l’air avec le moins de frottement et de perturbation possible.

 

Cette capacité est généralement décrite par un facteur qu’on appelle le coefficient balistique du projectile (il en existe 2 G1 et G7 nous rentrons dans les détails de ces coefficients balistiques dans un autre article).

 

Plus la cible sera lointaine moins il y aura d’énergie cinétique à l’impacte

 

On arrive donc maintenant au moment de l'impact et donc nous allons maintenant passer dans le domaine de la balistique terminale science au combien plus complexe que les deux précédentes !

   1.3) La balistique terminale

La balistique terminale consiste en l’étude des dégâts infligés par un projectile, en l'occurrence ici une balle.

 

On reprend ici la citation de Lavoisier : « Rien ne se perd, rien ne se crée, tout se transforme».

 

Le projectile lors de sa pénétration dans l’animal va freiner, en freinant, il va transformer l’énergie cinétique en énergie de déformation.

Si le projectile ne ressort pas alors, la totalité de l’énergie cinétique a été transformée en énergie de déformation.

 

Ici on parle bien de déformation d’un corps et donc de tissus qui sous la déformation vont rompre et créer une hémorragie plus ou moins importante.

 

Qu’est-ce qui caractérise un bon projectile de chasse au gros gibier ?

 

  • Une pénétration complète de l’animal, deux orifices entraînent des traces au sol plus importantes pour garantir de retrouver l’animal

 

  • Une libération d’énergie maximale, la vitesse de sortie du projectile dans l’animal doit être très faible

 

  • Le projectile doit donc conserver au maximum sa masse pour garantir une bonne pénétration

 

  • La libération d’énergie de déformation doit être maximale entre 10 et 40 cm de pénétration pour libérer l’énergie dans les organes vitaux.

 

Comment les industriels mesurent-ils ces paramètres ?

 

L’utilisation de gel balistique à 10% s’est généralisée dans l’industrie, la matière permet de parfaitement simuler les propriétés mécaniques d’un corps. Sa transparence permet également d’observer le travail du projectile au cours de la pénétration.

 

L’arrivée de caméra très hautes vitesses permet également de faire une mesure de la vitesse du projectile image par image et donc de mesurer le freinage du projectile point par point. Cela permet de s’assurer d’une bonne libération d’énergie à la bonne profondeur.

Exemple : Balle XRG de chez Solognac VS balle SPCE de chez Solognac



Comment travaille une balle de chasse ?

 

Les tissus sont composés à 80% d’eau, lors de la pénétration du projectile, la force exercée par le fluide sur le projectile va tendre à le déformer de manière plus ou moins importante en fonction de l’architecture du projectile.

 

Une bonne balle de chasse est donc un projectile qui va se déformer de manière contrôlée.

En se déformant, la surface avant du projectile augmente et donc il va freiner plus rapidement. 

 

Nous sommes ici sur le même phénomène qu’un parachute qu’on ouvrirait plus ou moins grand. 

 

  • Si trop peu de déformation alors freinage faible et donc libération d’énergie faible : Voilà pourquoi une FMJ est interdite à la chasse, car la balle est trop dure et ne se déforme pas

 

  • Si trop de déformation alors le freinage va être trop important, la pénétration ne sera pas bonne, et la libération d’énergie trop précoce.

 

Les balles en plomb : 

 

Les balles de chasse conventionnelles utilisent toutes deux matières, du cuivre et du plomb. La proportion et la répartitions de ces deux matières modifie le comportement du projectile

Le cuivre permet : 

 

  • D’apporter de la rigidité au projectile
  • De diminuer l'encrassage du canon
  • De garder, le projectile intègre à la sortie du canon avec les vitesses de rotation importantes.

 

Le plomb permet : 

 

  • D'apporter du poids et donc de l’inertie au projectile (masse volumique importante)
  • D’apporter de la souplesse au projectile, le plomb est plus mou que cuivre

 

Le dosage sur les épaisseurs de cuivres, et architectures diverses permet de contrôler le comportement du projectile à l’impacte.

Une FMJ a gauche, suivi d'une balle de chasse "fragile", suivie d'une balle de chasse pour une forte pénétration, suivie d'une balle monométallique.

 

Les balles en cuivre : 

 

Les balles en cuivre ou alliage de cuivre sont en monomatière et donc ne comporte pas de plomb. (matière controversée pour son impact sur les organismes vivants)

Mais comme nous l’avons vu plus tôt, le cuivre est beaucoup plus dur que le plomb. 

Il faut donc trouver une solution pour le déformer à l'impact.

 

Une seule solution existe, créer une cavité à l’avant du projectile pour que le fluide créer une pression dans cette cavité qui va alors ouvrir le projectile.

 

Deux types d’architectures possibles ensuite : 

 

Le champignonnage, consiste en une déformation uniforme, qui va créer un champignon à l’avant du projectile

Ce champignonnage est obtenu par le perçage d’un trou d’un certain diamètre à l'avant du projectile

 

La pétalisation, consiste en une déformation non uniforme, à créer des pétales qui avec la rotation vont agir comme des lames qui vont trancher les tissus.

Cette pénalisation est obtenue par le perçage d’un trou d’un certain diamètre à l'avant du projectile puis du passage en force d’une matrice carrée (créer 4 pétales) ou d’un pentagone (créer 5 pétales)

Une vidéo en complément :

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1 commentaire

Merci pour toutes ces explications qui sont très claires, et abordables pour la pluparts. Je suis principalement chasseurs battue et approche et un peu tireur loisir. Il est important d’en connaître un peu plus sur le travail d’un projectile sur un animal que ce soit lors d’une battue ou à l’approche à des distances plus importantes.

Laurent HAELEWYN

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